Chez Reine.

Publié le par mdemion

La rivière déboule en cascade en se glissant entre les rochers plats et noirs puis s'étale en mare à l'abri de majestueuses fougères arborescentes. Elles ont fait leur nid sous des ficus qui côtoient le tronc élancé d'un araucaria. Plus haut, la montagne se pèle d'une herbe sèche et rousse qui arrondi les sommets. Sous un agathis, une platée de lichens bleu renvoie la lumière du soir.

Nous sommes chez Reine perdu dans la montagne. Pour arriver ici, il nous a fallu quitter la route côtière pour un chemin de traverse qui ne tarde pas à devenir piste. Le chemin pierreux et rouge grimpe en virages puis se coule dans une petite vallée avant de gravir en zigzag un col. La descente est sèche et ne s'embarrasse pas de faux plat, elle pique directement vers un torrent qu'elle franchit par un radier avant de tourner par un virage éblouissant de verdure face à la roche nue.

Par deux fois nous avons du demander notre chemin tant les indications: chez Reine sont difficiles à trouver. Quelques bovins s'abritent sous les arbres, deux ou trois chevaux galopent à flanc de montagne, le ciel nuageux donnent un air maussade au panorama. Au sommet d'un col une bifurcation nous envoie au gite de Reine. Le chemin bute sur un clos ombragé de cocotier et de fougères.

Il y a un coté Robinson Crusoé dans le petit établissement loin du monde. Deux voyageurs atypiques seront nos compagnons d'un soir: l'un sans age fait la route depuis huit ans, il se confectionne une rudimentaire canne à pèche et disparaît sans un mot en direction du torrent, l'autre allemand sculpte consciencieusement une branche d'arbre dans un style néo canaque. Nos deux hôtesses parlotent dans la cuisine en pleine air.

Je goute avec bonheur ce moment hors du temps. A la question: « il ne vous manque rien? Elles répondent : Nous avons l'eau, l'électricité, un frigo, la télé nous n'avons besoin de rien d'autres! »

Et le temps passe dans les gargouillis de l'eau et le soir qui tombe sans heurts. Je goute le silence emplit de petits bruits quotidiens; il m'entraine dans une débauche de souvenirs proches et lointains. Pas d'amertume sur le temps qui passe, juste quelques vagues regrets.

Un genre de nostalgie.

Deux citations s'entrechoquent dans ma tête:

L'une de J M Tjibao: Notre identité est à construire. L'autre de Paol Keineg: Il nous reste le parfum violent d'une patrie à construire. De chaque coté du monde, ces hommes éclaireurs d'avenir ont dit la même chose. Le devenir est plus important que le passé. Ils nous revoient en ping pong des paroles de bon sens.

Breton et Kanak Se servir du passé pour éclairer l'avenir de nos peuples.

Si je parle de peuple c'est que la République Française a truqué le sens des mots: Peuple, Nation, État sont des données bien différentes:

Un état peut se composer de plusieurs peuples ( voir la Suisse) ou de plusieurs nations(voir la Grande Bretagne) seule une volonté d'uniformisation veut réduire les différences. Dans uniformisation il y a la racine uniforme (vêtement militaire). Il est donc logique que l'état français trouve des résistances à mettre dans le même moule des histoires différentes des cultures différentes. C'est pourquoi il veut Intégrer. Mais qui dit intégrer dit modèle à imiter voire à cloner. Ou est le modèle? Je ne l'ai pas rencontré!

Si l'état de droit se doit d'être la référence de lois uniques pour tous, il doit laisser et donner les moyens de la diversification. Vaste débat! Un moustique me fait risette, les bruits de casseroles impétueux sonnent, mon ventre crie famine, il est temps que je cesse mes élucubrations.

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